Pour moi, une matrone était en quelque sorte, une "maîtresse femme", femme mûre, mère et à fort caractère...
Trouver le serment de "matronat" d'une ancêtre maternelle dans les
actes paroissiaux du XXVIIIème siècle en Lorraine m'a alors
interpellée.
MATRONE ? oui mais encore ?
Du latin matrona (« dame », « épouse »), qui dérive de mater (« mère »).
La recherche du mot "Matrone" renvoie les définitions suivantes
:
-
Dans l'Antiquité, à Rome, dame, femme mariée ;
-
Par extension, femme d'âge mûr, expérimentée, sage, d'aspect digne et respectable,
généralement mère de famille ;
- Au sens péjoratif, femme d'un certain âge, grosse, souvent laide et d'allure vulgaire.
-
Entremetteuse, tenancière de maison close
-
Vieilli, femme qui pratique les accouchements,
sage-femme
La MATRONE était donc une sage-femme ?
Effectivement, la matrone assistait les femmes lors de leur accouchement.
Mais leur rôle était aussi (voire surtout) religieux car à l'époque, mourir sans être baptisé dans la foi chrétienne empêchait d'une part, d'être enterré dans le cimetière et d'autre part, condamnait la survie de l'âme.
La matrone avait donc pour mission, en cas d'accouchement difficile ou de risque de décès de l'enfant, d'ondoyer coûte que coûte ce dernier.
Dans les registres paroissiaux, on trouve donc des actes où
l'enfant est baptisé sur une main, un bras, un pied, au lieu de
l'habituel ondoiement sur le front.
Lire, pour exemple, 1716 - Enfant baptisé dans le ventre de sa mère
Ainsi, en cas de décès, l'enfant, devenu membre de l'Eglise Catholique, et dont l'âme était lavé du pêché originel, pouvait aller directement au Paradis tandis que son petit corps pouvait être inhumé en terre bénite.
Comment devenait-on Matrone dans les années 1700 en Lorraine ?
La matrone était une femme que rien ne prédestinait à assumer cette fonction, hormis le fait d'être elle-même mère.
Dans l’ordonnance du 28 mars 1708, portant règlement pour la médecine et la pharmacie, qui comprenait 37 articles, l’article XXV fait pour la première fois en Lorraine, obligation pour les sages-femmes de passer un examen. A l’exemple de la France, la Lorraine réglementait ainsi la profession de sage-femme. Le 22 juin 1708, un arrêt de la cour réglait définitivement l’élection des sages-femmes « élection qui devait se faire à la pluralité des voix des femmes de la paroisse », après examen de la future sage-femme par un médecin, gratuitement et sans frais. (source : hal.univ-lorraine.fr - La vie à l'école de Sages-femmes de Nancy : des temps anciens à 2008 - Laure Abensur)
Entre 1663 et 1792, à Bidestroff (Moselle), 3 matrones figurent dans les registres paroissiaux
Les deux actes de 1738 et 1757 concernent l'élection de la matrone tandis que celui de mon ancêtre en 1771 transcrit le serment de la matrone déjà élue à la pluralité des voix des femmes de la paroisse.
Le serment d'Anne COESEUR
Anne COESEUR est mon ancêtre maternelle à la 8ème génération (sosa 211).
Fille de Dominique et d'Eve CORINGER, Anne COESEUR est née le 06 septembre 1699 à Rodalbe.
Elle a eu 10 enfants de son union avec Jean FRICHE dont Marie Gabrielle Anne (1740-1805), mon ascendante. Son mari est décédé le 12 février 1768.
Le 16 juin 1771, Anne COESEUR est élue matrone à la pluralité des voix des femmes de Bidestroff.
Le dimanche 23 juin 1771, Anne COESEUR prête serment devant Monsieur le curé de Bidestroff, en ces termes :
" Je Anne Coeseur femme de défunt Jean
Friche laboureur promet a Dieu, le createur
tout puissant et à vous Monsieur mon pasteur
de vivre et mourir en la foy de l’église
catholique apostolique et Romaine, et
que je macquitteray avec le plus de fidélité
et de diligence qu’il me sera possible
de la charge que jentreprends d’assister de
nuit et de jour les femmes pauvres et
riches, dans leurs couches, que j’apporterai
tous mes soins pour empecher qu’il n’arrive
aucun accident a la mere ny a l’enfant
je declare avoir este elue a la pluralité
des voix par les femmes de Bidestrof le seize
du mois de juin de l’an mil sept cent soixante
et onze et a preste son serment le dimanche
vingt trois du dudit mois de l’an elle a fait sa
marque n’ayant lusage d’écrire "
AD57 – BIDESTROFF - 9NUM/84ED1E5 – BMS - 1770-1783 – img 9 |
La première intervention de mon ancêtre dans le registre de Bidestroff
Dans les registres paroissiaux de Bidestroff, le premier acte faisant référence à l'intervention de mon ancêtre est daté du 10 janvier 1772.
AD57 – BIDESTROFF - 9NUM/84ED1E5 – BMS - 1770-1783 – img 14 |
Lenfant de joseph Romain né
Le dix janvier mille sept soixante et douze
baptisé par la sage femme en presence de
plusieurs autres est mort entre ses mains il
a esté enterré le soir en presence de son pere
J'ignore la durée du matronat d'Anne COESEUR.
Elle est décédée le 06 février 1790, à Dieuze (Moselle), à l'âge de 90
ans.
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