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07 avril 2024

14 - Jean Ulrich SCHEYDECKER - sosa 448

Joannes Udalricus (Jean Ulrich) SCHEYDECKER (1675-1735) est un ancêtre qui n'a pas encore dévoilé tous ses secrets...

De multiples questions demeurent aujourd'hui sans réponse, notamment sur son ascendance et son lieu d'origine.

Je ne désespère pas de trouver des informations dûment sourcées pour compléter un jour mes données.

 





 

07 avril 2024

14 - Jean Ulrich SCHEYDECKER - sosa 448

24 mars 2024

12 - Anne Marguerite MULLER - sosa 233

Petite mise en lumière d'une jeune femme de ma lignée maternelle.
 
Mon ancêtre, Anne Marguerite MULLER, n'a pas eu une longue existence puisqu'elle est décédée à l'âge de 37 ans.
 
Une vie courte, très certainement simple mais rude, durant laquelle elle se mariera deux fois et aura sept enfants.
 





24 mars 2024

12 - Anne Marguerite MULLER - sosa 233

03 février 2024

5 - Barbe DECHERY - Sosa 957

𝐁𝐚𝐫𝐛𝐞 𝐃𝐄𝐂𝐇𝐄𝐑𝐘 - 𝑚𝑎 "𝐵𝑎𝑟𝑏𝑒  𝑟𝑜𝑠𝑒" 𝑎𝑢𝑥 5 𝑒́𝑝𝑜𝑢𝑥 !


 

 


 



 



03 février 2024

5 - Barbe DECHERY - Sosa 957

15 janvier 2024

3 - Jean Louis DELANCHY - Sosa 502

𝐴𝐼𝑆𝑁𝐸 : 𝑢𝑛 𝑚𝑎𝑛𝑜𝑢𝑣𝑟𝑖𝑒𝑟 𝑑𝑒́𝑐𝑒̀𝑑𝑒 𝑑𝑎𝑛𝑠 𝑢𝑛 𝑎𝑐𝑐𝑖𝑑𝑒𝑛𝑡 𝑑𝑒 𝑐ℎ𝑎𝑟𝑖𝑜𝑡 !


 

 

15 janvier 2024

3 - Jean Louis DELANCHY - Sosa 502

09 janvier 2024

2 - Mathias GÉRARD - Sosa 1012


09 janvier 2024

2 - Mathias GÉRARD - Sosa 1012

01 juillet 2021

Sosa 59 (1797-1856) - Je m'appelle Marguerite EMEL et je suis d'Hazembourg

Focus sur mon sosa 59, pour participer à l'idée que j'avais suggérée sur le groupe Facebook Généalogie Nord-Pas-de-Calais (évoquer nos sosas 59 et 62, par rapport à la numérotation départementale).

Marguerite EMEL n'est pas originaire du Nord mais d'Hazembourg en Moselle.

Elle est ma quadrisaïeule maternelle.

Mais laissons-la conter son histoire...


Je m'appelle Marguerite EMEL et je suis d'Hazembourg

Je suis née le 28 février 1797 à Hazembourg, dans ce tout jeune département de la Moselle, créé le 04 mars 1790, suite à la Révolution française.
Le 22 décembre 1789, les députés de l’Assemblée se mettent d’accord sur une nouvelle division du Royaume de France. C'est la naissance des départements. Chacun d'entre eux est découpé en districts, eux-mêmes découpés en cantons. Ce décret est adopté le 22 décembre, mais il faudra ensuite attendre deux mois, pour que le nombre définitif de départements soit fixé à 83. Les noms donnés à ceux-ci s'inspirent des éléments naturels : fleuve, cours d’eau, montagne…
Carte de la Moselle, entre 1790 et 1793, peu après sa création - Source wikimedia commons

HAZEMBOURG, vous connaissez ? Non ?
C'est un petit village situé à 10 km de SARRALBE, canton dont il fait partie depuis 1790.
  
  • Allez, un peu d'histoire, ça vous dit ? juste pour situer un peu.
Au Moyen-Age, Hazembourg dépendait de la seigneurie du Guéblange, réunie à la châtellerie d'Albestroff vers 1380.
En 1538 et 1598, le village se nomme Hassombourg.
Hazembourg a grandement souffert de la Guerre de Trente Ans (1618-1648) comme l'atteste un document de 1637 qui stipule "À Überkinger, Wentzwiller, Steinbach, Schweix, Altwiller, Hazembourg et Kirviller ne réside personne depuis un an, les villages étant abandonnés."
Mais la vie revient et le nom du village fluctue : Hayembourg en 1664, Hasembourg en 1703 (voir carte ci-dessous), Hassembourg en 1755, Hazembourg en 1756, Hasenbourg en 1793...


  • Mais alors, quand est-ce que les "EMEL" sont arrivés à Hazembourg ?
La famille EMEL s'installe au Val-de-Guéblange (à environ 3 km d'Hazembourg) entre 1696 et 1701.
  • Comment le sais-je ?

 

Mon arrière-grand-père (donc ton septaïeul, si tu veux te faire mousser un peu), Pierre EMEL (1666-1739) était marié, en première noce, avec Marguerite BAURINE, décédée le 14 juillet 1701 au Val-de-Guéblange. Mais un de leurs enfants, Jean-François EMEL, est né le 03 juin 1696 à Homburg (dans "ton" Allemagne actuelle).
 
Donc, tu peux penser qu'ils sont venus en Lorraine, après la Paix de Ryswick... cela est cohérent...

Mais moi, je suis une descendante de son second mariage, avec Anne-Marie MULLER.


Je suis la 5ème enfant d'une fratrie de 11 

A ma naissance, mon père, Pierre EMEL, a 39 ans et ma mère, Christine FIDER, en a 29.
  •  Quel est alors le métier de mon père ?

Il est tonnelier, un métier utile à de nombreuses corporations : drapiers, tanneurs, porteurs d'eau, bouchers et, bien entendu, vignerons. Il fabrique baquets, bailles, baignoires, barattes, barils, barillets, cuveaux, seaux, seillons, hottes et bien sûr tonneaux.

Il est maire d'Hazembourg en 1804 et 1811.

  • Que puis-je te dire au sujet de ma mère ?
    
Christine FIDER
(1767-1840), est née à Steinbach (tu sais, c'est l'un des 5 cinq villages qui composent Le-Val-de-Guéblange)
Mais elle est une descendante d'immigrants belges et picards, venus repeupler la Lorraine exsangue après la Guerre de Trente Ans.
Je t'entends et oui, tu as raison, la Lorraine est terre d'accueil et de brassage des populations !

  • Depuis quand mes parents sont-ils mariés ?
A ma naissance, mes parents sont mariés depuis près de 10 ans (ils ont reçu la bénédiction nuptiale le 22 mai 1787 à Hazembourg). 
 
Ma mère tombe aussitôt enceinte puisque leur premier enfant naît 9 mois plus tard, le 29 février 1788 et meurt malheureusement deux semaines plus tard. C'était une fille, une petite Marguerite (oui, je sais... je suis née un 28 février et porte le même prénom... je suis donc "l'enfant de remplacement" comme tu dis en psychogénéalogie...).
 
Naissent ensuite, avant moi :
  • Jean Pierre, le 04 septembre 1789
  • Jean, le 05 février 1792 (décédé à 19 mois, le 08/09/1793)
  • Anne Marie, le 26 juin 1794

Puis viendront, après moi, 2 sœurs et 4 frères :

  • Georges, le 29 juillet 1799
  • Catherine, le 31 octobre 1801
  • Marguerite, le 03 janvier 1804
  • Jean Michel, le 27 novembre 1805 (décédé à 8 ans, le 19 octobre 1814)
  • Jean, le 08 septembre 1807 (décédé à 15 mois, le 05 décembre 1808)
  • Jean Pierre, le 08 janvier 1811

 Je me marie 3 mois, jour pour jour, après le décès de mon frère Jean Michel

Le jeudi 19 janvier 1815, j'épouse, à l'âge de 17 ans et 10 mois, Pierre CLEMENT, de 8 ans mon aîné.
 
A cette date, Hazembourg est rattaché à la paroisse de Kirviller car aucun prêtre n'est présent dans le village.
Le 10 avril 1810, mon père, Pierre EMEL, alors maire, est signataire, avec 5 autres habitants, d'une lettre de mécontentement auprès de l'évêque de Metz à ce sujet. Kirviller se trouve à une grande lieue, et même cinq quarts de lieue.  Il faut traverser un bois par un mauvais chemin et c'est dangereux. A défaut d'avoir un prêtre, un rattachement à Kingeren (Kappelkinger) serait plus approprié de par la distance et le chemin aisé pour y arriver.
Hélas, les habitants n'obtinrent pas gain de cause. (source : AD57 -29 J 731)

  • Qui est mon époux ?
Pierre CLEMENT est né, juste avant la Révolution française, le 28 janvier 1789 à Audviller. Il est le 8ème enfant d'une fratrie de 11.
Son père, Jacques CLEMENT, décédé à 58 ans, le 14 avril 1806, était maître tailleur d'habits.
Sa mère, Christine HEYMES, a 59 ans à notre mariage.

Pierre est menuisier (tu peux effectivement penser qu'il connaissait mon père, tous les deux étant dans le métier du bois, comme on dit...)

Entre l'âge de 18 et 39 ans, je mets au monde 9 enfants


  1. Anne Marie dite Marie Anne naît 10 mois après le mariage, le 14 novembre 1815
  2. Jean Michel, le premier garçon, se présente le 1er juillet 1818
  3. Pierre, notre second fils, arrive le 10 août 1820
  4. Georges, né le 05 janvier 1823, ne vit que 5 mois et rend son âme à Dieu, le 13 juin
  5. Nicolas voit le jour le 04 avril 1824
  6. Jacob (Jacques) naît le 08 janvier 1827 (il sera emporté par la fièvre typhoïde à l'hôpital de Grenoble, le 30 octobre 1852. Il était premier servant à la 5e batterie du 5e Régiment d'artillerie).
  7. Jean vient au monde le 27 juin 1829  (il optera pour la nationalité française en 1872)
  8. Madeleine, seconde fille (et ton ancêtre directe), apparaît le 19 août 1831
  9. Jean Pierre, le petit dernier, est mon cadeau d'anniversaire, le 28 février 1836 (j'ai la douleur de le perdre, à 3 ans, le 25 avril 1839)


La religion ou plutôt les curés sont au cœur de notre vie rurale

  • Le 24 janvier 1819, Hazembourg n'a toujours pas de curé et les habitants adressent un nouveau courrier au Vicaire général.
Les enfants d'Hazembourg restent sans instruction. Ils sont tellement délaissés que même quand, de temps en temps, ils se trouvent dans une autre église pendant l'instruction, ils sont fourrés dans un coin.
Si la paroisse doit rester attachée à Kirviller, nous dirons adieu à la religion !

  • Hazembourg obtient gain de cause et un curé est enfin attaché à la paroisse d'Hazembourg
  • Mais l'abbé HEMES, vicaire nommé en 1826, sème la désunion et trouble notre paix, incitant Nicolas STENGEL, maire, à rédiger un courrier, le 13 août 1827, à l'évêque du diocèse de Metz (AD 57 -29 J 731)
...ce jeune prêtre, on ne sait par quel caprice, se permet de molester et même d'insulter publiquement ceux qui ont le malheur de lui déplaire ; les dimanches, oubliant la sainteté de son ministère et le texte de son discours par une digression honteuse, il passe aux injures les plus grossières et les plus offensantes et cela, avec si peu de retenue et de ménagement qu'on s'aperçoit que c'est à regret qu'il s'abstient de nommer les personnes qu'il s'était proposer de molester...
  • Les propos de ce curé sont si choquants qu'une vingtaine de paroissiens n'ont pas fait leurs Pâques et que plusieurs personnes ne vont plus à la messe. Toi qui vis à une époque où toute forme de discrimination peut être condammnée, ton sang n'aurait fait qu'un tour, comme on dit, en entendant de telles déclarations
Monsieur le Curé a dit un dimanche qu'une femme qui est maîtresse à la maison, c'est une honte. Il a ajouté que dans un ménage où la femme porte la culotte, le diable est assis sur la crémaille de la cheminée...

  • Une autre fois, il indique
qu'il avait vu une vache sur une voiture à foins, et une vieille peau à côté d'elle, mais que c'était une vache à deux jambes. Monsieur le Curé parlait d'une fille qui déchargeait du foin avec sa mère, dans la grange

  • Ce comportement alimente les conversations et le maire supplie que ce curé soit remplacé par un digne prêtre qui soit plus modéré.


Je mène une vie simple

Si tes recherches n'ont pas mis en évidence d'événements particuliers à mon sujet, c'est que je mène une vie simple, rythmée par les aléas des saisons.

En 1847, lorsque notre fils Jean-Michel se marie, Pierre, âgé de 58 ans, est alors cultivateur.
Je suis mentionnée "sans profession" mais, comme tu peux t'en douter, je suis loin d'être inactive.

Je ne verrai pas le mariage de ton arrière-arrière grand-mère

Je m'éteins quelques jours avant mon 59ème anniversaire, le 17 février 1856.
Pierre me survivra, 7 ans et 4 mois et me rejoindra le 17 juin 1863.

Ma fille Madeleine (ton arrière-arrière grand-mère maternelle) se mariera le 28 octobre 1857 avec Eugène Nicolas Désiré SCHEIDECKER

Mais ça, c'est une autre histoire et la mienne s'arrête là en ce qui concerne ma vie terrestre.
Si tu dois retenir autre chose de mon passage, arrête-toi juste sur mes initiales : M.E.
Voilà le sens de la vie : AIME !





 


01 juillet 2021

Sosa 59 (1797-1856) - Je m'appelle Marguerite EMEL et je suis d'Hazembourg

07 février 2021

Dans l'enfer de Dora, André SCHEIDECKER, mort pour la France à 22 ans, en 1944



 "Mille manteaux, valises et chapeaux 
Marchent en rang, comme un troupeau
Savent-ils vraiment ce qui les attend ?
D'autres certainement"
Le violon pleure - Frédéric Lerner

 

Le tunnel de Dora

 

Mon cher André,

Ce 5 février, est un bien triste anniversaire... celui de ton tragique décès, en 1944, dans ce camp de la mort ou plutôt, devrais-je dire, dans cette usine de mort, le sinistrement célèbre TUNNEL DE DORA

Tu es le cousin de ma mère, côté Scheidecker, un cousin qu'elle n'a malheureusement pas connu de par son placement à l'assistance publique.

 

Mais commençons par le début.

Tu es né français, un jeudi, le 21 avril 1921, à DIEUZE dans le sud du département de la Moselle, 1er enfant d'Emile Eugène SCHEIDECKER et de Marie-Henriette FREMY, mariés depuis le 06 mai 1919.

André Jean SCHEIDECKER au sein de sa famille

 

 


 





 

 

De ton enfance, je ne sais pas grand chose. 

Le registre matricule militaire de ton père mentionne un autre enfant né le 24 juin 1927 mais je n'en ai retrouvé aucune trace, à ce jour. 

Pour la petite histoire, j'ai trouvé, lors de mes recherches généalogiques, un Jean-Nicolas SCHEIDECKER né le 24 juin 1928 mais c'était un de tes cousins au 5ème degré. J'avais espéré une erreur d'inscription sur le registre paternel... mais comme on dit, j'ai fait chou blanc.

 

Je te retrouve, prénommé Andreas, en 1943, à SARREBOURG, à une trentaine de kilomètres de ta ville natale.

Tu vis désormais sur cette terre mosellane à nouveau annexée par l'Allemagne depuis juillet 1940.

Électricien de métier, tu as été recruté comme auxiliaire au sein de cette récente Société Nationale des Chemins de Fer Français (SNCF) qui a remplacé, depuis le 1er janvier 1938, les deux réseaux ferroviaires d'Etat et les compagnies privées.

Il faut dire que les Chemins de fer, c'est vraiment une histoire de famille chez les SCHEIDECKER puisque ton père Emile, ton oncle Nicolas Eugène dit "Eugène" et ton grand-père Jean-Nicolas travaillaient aux Chemins de fer d'Alsace et Lorraine.

 

Né au mauvais moment au mauvais endroit, tu reçois ton ordre de mobilisation le 11 août 1943, pour être incorporé de force dans la Wehrmacht comme toutes les jeunes Mosellans et Alsaciens.

Plus de 103 000 Alsaciens et 31 000 Mosellans se retrouvèrent ainsi incorporés de force. La plupart de ces "Malgré Nous" furent affectés dans la Wehrmacht, mais de nombreuses classes furent versées d'autorité dans la Waffen-SS dont les divisions comptaient de nombreuses pertes lors des combats.

Le monument aux Malgré-Nous à Sarreguemines (57)


Très vite, tu décides de ne pas y répondre et de passer des territoires annexés en zone occupée.

Pas question pour toi d'être enrôlé et de porter l'uniforme allemand ! Tu es né français, tu te sens bien français de cœur et d'âme ! Relativement hâbleur, tu ne doutes pas un instant que ton choix est le meilleur !

Source Wikipédia

 

Tu prends alors le train de Sarrebourg jusqu'à la gare de Nouvel-Avricourt, désormais frontière avec la Meurthe-et-Moselle.

La gare de Sarrebourg en 1938
 

  



Tu dois y retrouver un passeur qui aide les évadés et les personnes qui fuient le régime nazi à passer en zone occupée en fournissant cachette, faux papiers, fausses cartes de rationnement...

Malheureusement, le passeur tant attendu ne s'y trouve pas...

Que faire ? impossible de retourner en arrière au risque d'être arrêté... 

J'imagine ton désarroi et en même temps, cette poussée d'adrénaline qui t'incite à ne pas flancher.

 

Livré à toi-même, tu passes à travers champs en direction d'Emberménil (Meurthe-et-Moselle), à une dizaine de kilomètres. 

C'est là que tu es arrêté, le 12 août 1943, par deux membres de la Gestapo en civil circulant en voiture.

As-tu tenté de résister ? 
L'arrestation a-t-elle été plutôt musclée ou plutôt relativement calme ?

 

Incarcéré à SARREBOURG (Moselle) du 13 au 27 août 1943, tu es ensuite transféré à la prison de SARREGUEMINES (Moselle). 

Ton père Emile réussit à te voir en cachette dans ces deux villes et connaît ainsi les conditions de ton arrestation. 

 

Tu es ensuite interné à METZ (Moselle) puis le 08 décembre 1943, tu es déporté vers le camp de concentration de Natzweiler-Struthof en Alsace (Bas-Rhin actuel), sous le matricule 6476, comme Lorrain réfractaire à la Wehrmacht.

Situé à 60 km de Strasbourg, KL Natzweiler est le seul camp nazi situé sur le territoire français. L'hiver, le vent y est glacial, les températures oscillent entre -10° à -20° et la hauteur de neige peut atteindre 1,50 m

 

Source : www.struthof.fr/Ressources


Une semaine où tu vois sans doute fumer ce sinistre four crématoire mis en service depuis le mois d'octobre 1943.

Une semaine où tu côtoies sûrement ces prisonniers politiques français, ces "Nacht und Nebel", destinés comme leur nom l'indique à disparaître dans la nuit et le brouillard. Des prisonniers qui subissent des traitements particulièrement cruels

 

Mi-décembre, ton transfert vers Buchenwald est acté.

Dans la nuit du 16 au 17 décembre 1943, tu arrives vers 3 heures du matin à BUCHENWALD, par le convoi parti de Compiègne et passant par Metz et Francfort.

 

 

Entrée du Camp de Buchenwald

De ce convoi initial de 933 hommes, 11 ont réussi à s'évader lors de la traversée de la Marne, 1 est décédé durant le transport. Sur ces 921 déportés arrivés à Buchenwald, 821 sont français.

 A ton arrivée, considéré comme prisonnier politique, tu es immatriculé 38958

                      


 

  Ta carte de détenu mentionne que tu es affecté au bloc 63. 

Ce bloc 63 faisait partie du "petit camp", zone de quarantaine aménagée au nord du camp des prisonniers par les SS fin 1942. Il était séparé du reste du camp par des barbelés. Les déportés en provenance de tous les pays occupés par l'Allemagne y restaient quelques semaines avant d'être envoyés dans des camps extérieurs.

 

Dès le 21 décembre 1943, tu arrives au Kommando de Dora.

 

 

La tâche de ce Kommando consiste à transformer un stockage souterrain en usine moderne pour la production des fusées V1 et V2 à la chaîne, ces fameuses "armes secrètes" .

 


Tu vis littéralement l'enfer sur terre à DORA, dont le nom bien loin d'être le doux nom d'une femme ou d'un dessin animé, signifie "Deutsche Organisation Reichs Arbeit" - Organisation allemande du travail du Reich.

 

En permanence dans le tunnel, à trimer 18 heures par jour (12 heures de travail et 6 heures de formalités et de contrôles), dans une poussière qui brûle les poumons.

 

Pour s'aliter, des alvéoles ont été creusées sur 4 hauteurs et 120 mètres de long. Elles sont occupées en permanence, par les roulements d'équipes... impossible de vraiment dormir

 

Le froid et l'humidité sont intenses, l'eau suinte des parois provoquant une moiteur écœurante et permanente. 

 

Le bruit est insoutenable : machines, marteaux-piqueurs, cloche de la locomotive, explosions continuelles dans ce tunnel clos où tout résonne en échos...

 

Pas de chauffage, pas de ventilation, pas de bac pour se laver, des toilettes constitués de fûts coupés par le haut sur lesquels une planche est installée et... pas d'eau potable !

 

Les déportés ne voient la lumière du jour qu'une fois par semaine, à l'occasion de l'appel du dimanche !

 

La violence des S.S. n'a pas de limites entre moqueries, barbarie, persécutions, pendaisons...

Tu survivras moins de 7 semaines dans cet enfer où les conditions de vie et de travail sont atroces et inhumaines ! 

Mon pauvre André, je n'arrive même pas à imaginer à quel point tu as dû souffrir !

 

 

Tu meurs officiellement le samedi 05 février 1944 d'une faiblesse cardiaque par insuffisance mitrale.

Ton corps est sous doute jeté dans un camion, entassé au milieu de tes autres compagnons d'infortune... pour finir engouffré dans le four crématoire de Buchenwald.

 

Sur les 60 000 prisonniers de 21 pays passés par Dora, plus de 20 000 périrent !

Sur tous les documents que j'ai pu obtenir (archives de Dora, d'Arolsen...), tu es mentionné célibataire. Pourtant, l'émouvant avis de décès familial évoque ton épouse dont je ne cite volontairement pas le nom.

Tu peux reposer en paix, ta bien-aimée a vécu longtemps puisqu'elle s'est éteinte à 98 ans fin 2020. Son époux portait le même prénom que toi et ils ont eu 5 enfants (4 petits-enfants et 2 arrière-petits-enfants).

 

Tu es déclaré "Mort Pour La France" et par arrêté en date du 1er avril 1998, la mention "Mort en déportation" a été apposée sur ton acte et jugement déclaratif de décès.

 

Tu es décoré à titre posthume de la Médaille de la Résistance française.

 


 

Ton nom figure aussi sur la plaque commémorative de la SNCF, située dans le hall de la Gare de Sarrebourg (Moselle).


 

Une notice t'est également consacrée dans "Le Livre des 9000 déportés de France à Mittelbau-Dora" aux éditions du Cherche Midi.

 

Tu vois, mon cher André, ton nom ne tombera pas dans l'oubli et je tiens aussi à honorer ta mémoire au travers de cette lettre.

 

Je n'ai qu'un regret : ne pas pouvoir mettre un visage sur ton nom... mais j'ai tellement le sentiment de te connaître que ce n'est finalement pas si important.

 

"Personne ne s'évade de Dora, sauf ceux qui partent par la cheminée...

disaient les SS.

Mais s'ils ont voulu vous anéantir, votre souvenir ne tombera jamais dans l'oubli !


Repose en paix, très cher cousin.

 

 

"Ecoute son histoire
Ecoute ce violon qui pleure
Au nom de la mémoire
Ecoute grincer sa douleur
Et même si le bois vieillit
Sa triste musique reste en lui"
Le violon pleure - Frédéric Lerner


 

 

07 février 2021

Dans l'enfer de Dora, André SCHEIDECKER, mort pour la France à 22 ans, en 1944