29 août 2021
Le serment de la Matrone - Anne COESEUR en 1771 à Bidestroff
Pour moi, une matrone était en quelque sorte, une "maîtresse femme", femme mûre, mère et à fort caractère...
Trouver le serment de "matronat" d'une ancêtre maternelle dans les
actes paroissiaux du XXVIIIème siècle en Lorraine m'a alors
interpellée.
MATRONE ? oui mais encore ?
Du latin matrona (« dame », « épouse »), qui dérive de mater (« mère »).
La recherche du mot "Matrone" renvoie les définitions suivantes
:
-
Dans l'Antiquité, à Rome, dame, femme mariée ;
-
Par extension, femme d'âge mûr, expérimentée, sage, d'aspect digne et respectable,
généralement mère de famille ;
- Au sens péjoratif, femme d'un certain âge, grosse, souvent laide et d'allure vulgaire.
-
Entremetteuse, tenancière de maison close
-
Vieilli, femme qui pratique les accouchements,
sage-femme
La MATRONE était donc une sage-femme ?
Effectivement, la matrone assistait les femmes lors de leur accouchement.
Mais leur rôle était aussi (voire surtout) religieux car à l'époque, mourir sans être baptisé dans la foi chrétienne empêchait d'une part, d'être enterré dans le cimetière et d'autre part, condamnait la survie de l'âme.
La matrone avait donc pour mission, en cas d'accouchement difficile ou de risque de décès de l'enfant, d'ondoyer coûte que coûte ce dernier.
Dans les registres paroissiaux, on trouve donc des actes où
l'enfant est baptisé sur une main, un bras, un pied, au lieu de
l'habituel ondoiement sur le front.
Lire, pour exemple, 1716 - Enfant baptisé dans le ventre de sa mère
Ainsi, en cas de décès, l'enfant, devenu membre de l'Eglise Catholique, et dont l'âme était lavé du pêché originel, pouvait aller directement au Paradis tandis que son petit corps pouvait être inhumé en terre bénite.
Comment devenait-on Matrone dans les années 1700 en Lorraine ?
La matrone était une femme que rien ne prédestinait à assumer cette fonction, hormis le fait d'être elle-même mère.
Dans l’ordonnance du 28 mars 1708, portant règlement pour la médecine et la pharmacie, qui comprenait 37 articles, l’article XXV fait pour la première fois en Lorraine, obligation pour les sages-femmes de passer un examen. A l’exemple de la France, la Lorraine réglementait ainsi la profession de sage-femme. Le 22 juin 1708, un arrêt de la cour réglait définitivement l’élection des sages-femmes « élection qui devait se faire à la pluralité des voix des femmes de la paroisse », après examen de la future sage-femme par un médecin, gratuitement et sans frais. (source : hal.univ-lorraine.fr - La vie à l'école de Sages-femmes de Nancy : des temps anciens à 2008 - Laure Abensur)
Entre 1663 et 1792, à Bidestroff (Moselle), 3 matrones figurent dans les registres paroissiaux
Les deux actes de 1738 et 1757 concernent l'élection de la matrone tandis que celui de mon ancêtre en 1771 transcrit le serment de la matrone déjà élue à la pluralité des voix des femmes de la paroisse.
Le serment d'Anne COESEUR
Anne COESEUR est mon ancêtre maternelle à la 8ème génération (sosa 211).
Fille de Dominique et d'Eve CORINGER, Anne COESEUR est née le 06 septembre 1699 à Rodalbe.
Elle a eu 10 enfants de son union avec Jean FRICHE dont Marie Gabrielle Anne (1740-1805), mon ascendante. Son mari est décédé le 12 février 1768.
Le 16 juin 1771, Anne COESEUR est élue matrone à la pluralité des voix des femmes de Bidestroff.
Le dimanche 23 juin 1771, Anne COESEUR prête serment devant Monsieur le curé de Bidestroff, en ces termes :
" Je Anne Coeseur femme de défunt Jean
Friche laboureur promet a Dieu, le createur
tout puissant et à vous Monsieur mon pasteur
de vivre et mourir en la foy de l’église
catholique apostolique et Romaine, et
que je macquitteray avec le plus de fidélité
et de diligence qu’il me sera possible
de la charge que jentreprends d’assister de
nuit et de jour les femmes pauvres et
riches, dans leurs couches, que j’apporterai
tous mes soins pour empecher qu’il n’arrive
aucun accident a la mere ny a l’enfant
je declare avoir este elue a la pluralité
des voix par les femmes de Bidestrof le seize
du mois de juin de l’an mil sept cent soixante
et onze et a preste son serment le dimanche
vingt trois du dudit mois de l’an elle a fait sa
marque n’ayant lusage d’écrire "
|
AD57 – BIDESTROFF - 9NUM/84ED1E5 – BMS - 1770-1783 – img 9 |
La première intervention de mon ancêtre dans le registre de Bidestroff
Dans les registres paroissiaux de Bidestroff, le premier acte faisant référence à l'intervention de mon ancêtre est daté du 10 janvier 1772.
![]() |
AD57 – BIDESTROFF - 9NUM/84ED1E5 – BMS - 1770-1783 – img 14 |
Lenfant de joseph Romain né
Le dix janvier mille sept soixante et douze
baptisé par la sage femme en presence de
plusieurs autres est mort entre ses mains il
a esté enterré le soir en presence de son pere
J'ignore la durée du matronat d'Anne COESEUR.
Elle est décédée le 06 février 1790, à Dieuze (Moselle), à l'âge de 90
ans.
01 juillet 2021
Sosa 59 (1797-1856) - Je m'appelle Marguerite EMEL et je suis d'Hazembourg
Focus sur mon sosa 59, pour participer à l'idée que j'avais suggérée sur le groupe Facebook Généalogie Nord-Pas-de-Calais (évoquer nos sosas 59 et 62, par rapport à la numérotation départementale).
Marguerite EMEL n'est pas originaire du Nord mais d'Hazembourg en Moselle.
Elle est ma quadrisaïeule maternelle.
Mais laissons-la conter son histoire...
Je m'appelle Marguerite EMEL et je suis d'Hazembourg
Le 22 décembre 1789, les députés de l’Assemblée se mettent d’accord sur une nouvelle division du Royaume de France. C'est la naissance des départements. Chacun d'entre eux est découpé en districts, eux-mêmes découpés en cantons. Ce décret est adopté le 22 décembre, mais il faudra ensuite attendre deux mois, pour que le nombre définitif de départements soit fixé à 83. Les noms donnés à ceux-ci s'inspirent des éléments naturels : fleuve, cours d’eau, montagne…
- Allez, un peu d'histoire, ça vous dit ? juste pour situer un peu.
- Mais alors, quand est-ce que les "EMEL" sont arrivés à Hazembourg ?
Mais moi, je suis une descendante de son second mariage, avec Anne-Marie MULLER.
Je suis la 5ème enfant d'une fratrie de 11
- Quel est alors le métier de mon père ?
Il est tonnelier, un métier utile à de nombreuses corporations : drapiers, tanneurs, porteurs d'eau, bouchers et, bien entendu, vignerons. Il fabrique baquets, bailles, baignoires, barattes, barils, barillets, cuveaux, seaux, seillons, hottes et bien sûr tonneaux.
Il est maire d'Hazembourg en 1804 et 1811.
- Que puis-je te dire au sujet de ma mère ?
Christine FIDER (1767-1840), est née à Steinbach (tu sais, c'est l'un des 5 cinq villages qui composent Le-Val-de-Guéblange).
- Depuis quand mes parents sont-ils mariés ?
- Jean Pierre, le 04 septembre 1789
- Jean, le 05 février 1792 (décédé à 19 mois, le 08/09/1793)
- Anne Marie, le 26 juin 1794
Puis viendront, après moi, 2 sœurs et 4 frères :
- Georges, le 29 juillet 1799
- Catherine, le 31 octobre 1801
- Marguerite, le 03 janvier 1804
- Jean Michel, le 27 novembre 1805 (décédé à 8 ans, le 19 octobre 1814)
- Jean, le 08 septembre 1807 (décédé à 15 mois, le 05 décembre 1808)
- Jean Pierre, le 08 janvier 1811
Je me marie 3 mois, jour pour jour, après le décès de mon frère Jean Michel
Le 10 avril 1810, mon père, Pierre EMEL, alors maire, est signataire, avec 5 autres habitants, d'une lettre de mécontentement auprès de l'évêque de Metz à ce sujet. Kirviller se trouve à une grande lieue, et même cinq quarts de lieue. Il faut traverser un bois par un mauvais chemin et c'est dangereux. A défaut d'avoir un prêtre, un rattachement à Kingeren (Kappelkinger) serait plus approprié de par la distance et le chemin aisé pour y arriver.Hélas, les habitants n'obtinrent pas gain de cause. (source : AD57 -29 J 731)
- Qui est mon époux ?
Entre l'âge de 18 et 39 ans, je mets au monde 9 enfants
- Anne Marie dite Marie Anne naît 10 mois après le mariage, le 14 novembre 1815
- Jean Michel, le premier garçon, se présente le 1er juillet 1818
- Pierre, notre second fils, arrive le 10 août 1820
- Georges, né le 05 janvier 1823, ne vit que 5 mois et rend son âme à Dieu, le 13 juin
- Nicolas voit le jour le 04 avril 1824
- Jacob (Jacques) naît le 08 janvier 1827 (il sera emporté par la fièvre typhoïde à l'hôpital de Grenoble, le 30 octobre 1852. Il était premier servant à la 5e batterie du 5e Régiment d'artillerie).
- Jean vient au monde le 27 juin 1829 (il optera pour la nationalité française en 1872)
- Madeleine, seconde fille (et ton ancêtre directe), apparaît le 19 août 1831
- Jean Pierre, le petit dernier, est mon cadeau d'anniversaire, le 28 février 1836 (j'ai la douleur de le perdre, à 3 ans, le 25 avril 1839)
La religion ou plutôt les curés sont au cœur de notre vie rurale
- Le 24 janvier 1819, Hazembourg n'a toujours pas de curé et les habitants adressent un nouveau courrier au Vicaire général.
Les enfants d'Hazembourg restent sans instruction. Ils sont tellement délaissés que même quand, de temps en temps, ils se trouvent dans une autre église pendant l'instruction, ils sont fourrés dans un coin.Si la paroisse doit rester attachée à Kirviller, nous dirons adieu à la religion !
- Hazembourg obtient gain de cause et un curé est enfin attaché à la paroisse d'Hazembourg
- Mais l'abbé HEMES, vicaire nommé en 1826, sème la désunion et trouble notre paix, incitant Nicolas STENGEL, maire, à rédiger un courrier, le 13 août 1827, à l'évêque du diocèse de Metz (AD 57 -29 J 731)
...ce jeune prêtre, on ne sait par quel caprice, se permet de molester et même d'insulter publiquement ceux qui ont le malheur de lui déplaire ; les dimanches, oubliant la sainteté de son ministère et le texte de son discours par une digression honteuse, il passe aux injures les plus grossières et les plus offensantes et cela, avec si peu de retenue et de ménagement qu'on s'aperçoit que c'est à regret qu'il s'abstient de nommer les personnes qu'il s'était proposer de molester...
- Les propos de ce curé sont si choquants qu'une vingtaine de paroissiens n'ont pas fait leurs Pâques et que plusieurs personnes ne vont plus à la messe. Toi qui vis à une époque où toute forme de discrimination peut être condammnée, ton sang n'aurait fait qu'un tour, comme on dit, en entendant de telles déclarations
Monsieur le Curé a dit un dimanche qu'une femme qui est maîtresse à la maison, c'est une honte. Il a ajouté que dans un ménage où la femme porte la culotte, le diable est assis sur la crémaille de la cheminée...
- Une autre fois, il indique
qu'il avait vu une vache sur une voiture à foins, et une vieille peau à côté d'elle, mais que c'était une vache à deux jambes. Monsieur le Curé parlait d'une fille qui déchargeait du foin avec sa mère, dans la grange
- Ce comportement alimente les conversations et le maire supplie que ce curé soit remplacé par un digne prêtre qui soit plus modéré.
Je mène une vie simple
Je ne verrai pas le mariage de ton arrière-arrière grand-mère
Si tu dois retenir autre chose de mon passage, arrête-toi juste sur mes initiales : M.E.Voilà le sens de la vie : AIME !
27 mai 2021
27 MAI - AUGUSTIN
24 mai 2021
Rancoeur, rixes et meurtre en Vallée du Larboust en 1547
Nous sommes en l'an de grâce 1547, plus précisément le 1er mai.
![]() |
Henri II - Source : Wikimedia Commons |
François 1er, Roi de France, a rendu son âme à Dieu le 31 mars précédent, laissant le trône à son second fils, Henri II.
La France compte 17 millions d'individus (source : Contexte France - Thierry SABOT).
L'histoire se passe dans les Pyrénées, à Cazeaux-de-Larboust, dans la vallée du Larbouts.
Un capitaine animé de funestes intentions
Guillaume de Bossost, mon ancêtre à la 14ème génération, côté grand-mère paternelle, (ou bien son fils), a voulu marier sa nièce, Anne de Aucuson à Bertrand de Garus, le cousin germain de Jehan Sacaze, sans le consentement de la famille.
Guillaume de Bossost IIIème du nom, Seigneur de Campels et de la vallée d'Oueil, de Billère (ou son fils, IVème du nom, qui se marie le 10 mai 1552) est le descendant du Noble et Puissant Seigneur Adhémar de Bossost. Un mémoire dit que cette Famille ne peut être qu'un rameau de la Maison d'Espagne, des anciens Vicomtes de Couserans et Comtes de Paillas. (Source : Dictionnaire de la Noblesse, contenant les généalogies, l'histoire et la chronologie des familles nobles de France - De François-Alexandre Aubert de la Chesnaye des Bois - page 679)
Jehan Sacaze ainsi que toute la famille s'y sont opposés et Guillaume de Bossost, Capitaine de la Vallée du Larboust, en a gardé une rancœur qui s'est transformée en haine.
Jehan Sacaze est certainement de la famille Sacaze, de Castillon-de-Larboust (de laquelle descend Julien Sacaze, le célèbre épigraphiste du 19ème siècle, fondateur de la Société des études du Comminges et de la Revue de Comminges).
Et ce jour-là, lorsqu'il aperçoit les frères Guillaume et Bertrand Sacaze, cousins germains de Jehan, son sang ne fait qu'un tour et il se jette sur eux, l'épée à la main.
D'un tempérament aussi vif que l'air des Pyrénées, le féroce Capitaine Guillaume de Bossost blesse sérieusement les frères Sacaze, à plusieurs endroits du corps !
Au cours de la querelle, survient Jehan Darbouch qui, loin d'apaiser la situation, souffle sur les braises en criant "allons capitaine les achever de tuer".
Jehan Darbouch est très certainement un de mes ascendants, direct ou collatéral, de par son nom et la localisation de l'évènement. Dans l'acte original, il est écrit Jehan Darbouch mais aussi Arbouch. Cependant, l'état actuel de mes recherches ne me permet pas de le rattacher à Simon, né au début des années 1600, le plus ancien Arbouch de mon arbre généalogique.
Grâce à la présence de tierces personnes, les frères Sacaze ne sont pas massacrés.
La querelle s'envenime
Le lendemain, 02 mai 1547, Jehan Sacaze, ainsi que Pierre Sacaze, Pierre Cousin, Jourdain de Mieul et Saules de Garris, se rendent à Cazeaux pour emprunter quelques armes afin de pouvoir défendre leurs vies.
Armé d'une arbalète bandée, le trait dessus, Jehan Sacaze est avec ses amis, armés d'épées, de rondelles, de javelines, devant la maison du cordonnier Nicolas Arnauld Durand.
Arbalète - Source : Dictionnaire Larousse de 1905 |
Arrivent des familiers de Guillaume de Bossost, à savoir Jehan Darbouch, Estienne de Bordères, bailli de la Vallée du Larboust, armés d'épées et de rondelles et Ramond du Pont dit Ponthillon, avec son arbalète bandée d'un trait.
Entre Pierre de Sacaze et Jehan Darbouch, la discussion s'engage aussitôt au sujet du mariage et de l'agression de la veille. Chacun défend son point de vue et n'en démord pas.
Le ton monte rapidement tant et si bien que Pierre de Sacaze lance sa javeline sur Jehan Darbouch et le touche de la pointe au genou ou la cuisse. Ce dernier lui tire alors un pic de son épée.
Pierre Sacaze blesse Jehan Darbouch au pouce, Marc Daure jette plusieurs pierres pour défendre Jehan Sacaze et ses compagnons, Jourdain de Mieul tire plusieurs coups d'épée sans blesser personne.
Soudain, Ramond du Pont dit Ponthillon tire un trait d'arbalète vers la tête de Jehan Sacaze, manquant de le tuer. Pris de colère, celui-ci riposte et son trait d'arbalète touche Ponthillon à la cuisse ou à la hanche.
L'irréparable est commis
Plus tard, le dit Ponthillon et Jehan Darbouch se trouvant entre Cazeaux-de-Larboust et Castillon-du-Larboust, sont avertis que plusieurs personnes armées viennent pour les tuer. Ils ne veulent toutefois pas faire demi-tour...
C'est alors que Sébastien de Peiroulan, Vinhaulx Sacommo, Messire Raymond Sacome et plusieurs autres en groupe, armés d'épées, javelines et rondelles tombent sur Ponthillon et lui donnent plusieurs coups de pieds à la tête, aux bras et aux jambes. Jehan Sacaze est absent.
Ramond du Pont est tellement blessé qu'il se réfugie dans la maison de Nicolas Arnauld, aubergiste, où il décède très vite, sans pouvoir se confesser, ni recevoir l'extrême onction.
Enquête et arrestation de Jehan Sacaze
Une enquête du juge de Rivière est déclenchée (Cazaux fait partie du Pays et Jugerie de Rivière-Verdun et le Juge de Rivière siège à Montréjeau).
Le pays de Rivière-Verdun, appelé Jugerie de Rivière-Verdun (R.V.), est un petit pays d'élection de l'est de la Gascogne, appuyé à la rive gauche de la Garonne dans les départements français de la Haute-Garonne, de Tarn-et-Garonne, du Gers et des Hautes-Pyrénées.
Le juge ou son lieutenant ordonne l'arrestation de Jehan Sacaze et de ses partisans mais ceux-ci sont en fuite, en groupe et armés par crainte de leurs ennemis.
Jehan Sacaze est emprisonné à la prison du Larboust puis dans celle de la Salle Neuve à Toulouse.
Le château Narbonnais de Toulouse est l'ancien château médiéval des comtes de Toulouse. Il était situé à l'emplacement de l'actuel palais de justice de Toulouse à l'angle des allées Jules Guesde et de la place du Parlement, près de la place du Salin. Un édifice de la Salle neuve abrite alors la salle basse des détenus dépendant de la justice du sénéchal.
Un pauvre homme condamné à mort
Entendu et interrogé sur les événements, Jehan Sacaze, pauvre homme ayant femme et enfants à charge, est condamné à mort par le Sénéchal de Toulouse.
Jehan fait appel auprès du parlement pour un recours en grâce auprès du roi.
Grâce et pardon par le Roi Henri II
En 1552, Jehan Sacaze se voit accorder grâce et pardon par le Roi, attendu que ce cas est arrivé "sans le vouloir, mais par colère et crainte d'être tué". Le Roi intime au parlement de Toulouse de cesser toutes poursuites contre Jehan Sacaze.
Une lettre de rémission est un acte de la chancellerie par lequel le roi octroie son pardon à la suite d'un crime ou d'un délit, arrêtant ainsi le cours ordinaire de la justice, qu'elle soit royale, seigneuriale, urbaine ou ecclésiastique, au moyen d'une lettre patente. La rémission est un acte de pardon, de grâce ou d'indulgence, accordé par le roi. La rémission décharge le coupable de la peine qu'il avait encourue. Ce n'est pas une amnistie. Le délit existe toujours, mais il est interdit d'y faire référence, d'exiger une réparation ou autre.
Références et remerciements
Le document original est conservé aux Archives Nationales et est évoqué dans le Livre "La Gascogne dans les registres du Trésor des chartes" par Charles Samaran en 1966, page 229.
Le contenu et la transcription effectuée par Alain d'Haene, Président de l'Antenne de l'Entraide Généalogique du Midi Toulousain de Bagnères-de-Luchon, ont été diffusés dans la Lettre des Amis n° 277 de mars-avril 2016.
Je me suis largement inspirée de ces travaux pour écrire cet article et les en remercie.
07 février 2021
Dans l'enfer de Dora, André SCHEIDECKER, mort pour la France à 22 ans, en 1944
D'autres certainement"
Le tunnel de Dora |
Mon cher André,
Ce 5 février, est un bien triste anniversaire... celui de ton tragique décès, en 1944, dans ce camp de la mort ou plutôt, devrais-je dire, dans cette usine de mort, le sinistrement célèbre TUNNEL DE DORA !
Tu es le cousin de ma mère, côté Scheidecker, un cousin qu'elle n'a malheureusement pas connu de par son placement à l'assistance publique.
Mais commençons par le début.
Tu es né français, un jeudi, le 21 avril 1921, à DIEUZE dans le sud du département de la Moselle, 1er enfant d'Emile Eugène SCHEIDECKER et de Marie-Henriette FREMY, mariés depuis le 06 mai 1919.
![]() |
André Jean SCHEIDECKER au sein de sa famille |
De ton enfance, je ne sais pas grand chose.
Le registre matricule militaire de ton père mentionne un autre enfant né le 24 juin 1927 mais je n'en ai retrouvé aucune trace, à ce jour.
Pour la petite histoire, j'ai trouvé, lors de mes recherches généalogiques, un Jean-Nicolas SCHEIDECKER né le 24 juin 1928 mais c'était un de tes cousins au 5ème degré. J'avais espéré une erreur d'inscription sur le registre paternel... mais comme on dit, j'ai fait chou blanc.
Je te retrouve, prénommé Andreas, en 1943, à SARREBOURG, à une trentaine de kilomètres de ta ville natale.
Tu vis désormais sur cette terre mosellane à nouveau annexée par l'Allemagne depuis juillet 1940.
Électricien de métier, tu as été recruté comme auxiliaire au sein de cette récente Société Nationale des Chemins de Fer Français (SNCF) qui a remplacé, depuis le 1er janvier 1938, les deux réseaux ferroviaires d'Etat et les compagnies privées.
Il faut dire que les Chemins de fer, c'est vraiment une histoire de famille chez les SCHEIDECKER puisque ton père Emile, ton oncle Nicolas Eugène dit "Eugène" et ton grand-père Jean-Nicolas travaillaient aux Chemins de fer d'Alsace et Lorraine.
Né au mauvais moment au mauvais endroit, tu reçois ton ordre de mobilisation le 11 août 1943, pour être incorporé de force dans la Wehrmacht comme toutes les jeunes Mosellans et Alsaciens.
Plus de 103 000 Alsaciens et 31 000 Mosellans se retrouvèrent ainsi incorporés de force. La plupart de ces "Malgré Nous" furent affectés dans la Wehrmacht, mais de nombreuses classes furent versées d'autorité dans la Waffen-SS dont les divisions comptaient de nombreuses pertes lors des combats.
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Le monument aux Malgré-Nous à Sarreguemines (57) |
Très vite, tu décides de ne pas y répondre et de passer des territoires annexés en zone occupée.
Pas question pour toi d'être enrôlé et de porter l'uniforme allemand ! Tu es né français, tu te sens bien français de cœur et d'âme ! Relativement hâbleur, tu ne doutes pas un instant que ton choix est le meilleur !
Source Wikipédia |
Tu prends alors le train de Sarrebourg jusqu'à la gare de Nouvel-Avricourt, désormais frontière avec la Meurthe-et-Moselle.
![]() |
La gare de Sarrebourg en 1938 |
Malheureusement, le passeur tant attendu ne s'y trouve pas...
Que faire ? impossible de retourner en arrière au risque d'être arrêté...
J'imagine ton désarroi et en même temps, cette poussée d'adrénaline qui t'incite à ne pas flancher.
Livré à toi-même, tu passes à travers champs en direction d'Emberménil (Meurthe-et-Moselle), à une dizaine de kilomètres.
C'est là que tu es arrêté, le 12 août 1943, par deux membres de la Gestapo en civil circulant en voiture.
Incarcéré à SARREBOURG (Moselle) du 13 au 27 août 1943, tu es ensuite transféré à la prison de SARREGUEMINES (Moselle).
Tu es ensuite interné à METZ (Moselle) puis le 08 décembre 1943, tu es déporté vers le camp de concentration de Natzweiler-Struthof en Alsace (Bas-Rhin actuel), sous le matricule 6476, comme Lorrain réfractaire à la Wehrmacht.
Situé à 60 km de Strasbourg, KL Natzweiler est le seul camp nazi situé sur le territoire français. L'hiver, le vent y est glacial, les températures oscillent entre -10° à -20° et la hauteur de neige peut atteindre 1,50 m
Source : www.struthof.fr/Ressources |
Une semaine où tu vois sans doute fumer ce sinistre four crématoire mis en service depuis le mois d'octobre 1943.
Une semaine où tu côtoies sûrement ces prisonniers politiques français, ces "Nacht und Nebel", destinés comme leur nom l'indique à disparaître dans la nuit et le brouillard. Des prisonniers qui subissent des traitements particulièrement cruels
Mi-décembre, ton transfert vers Buchenwald est acté.
Dans la nuit du 16 au 17 décembre 1943, tu arrives vers 3 heures du matin à BUCHENWALD, par le convoi parti de Compiègne et passant par Metz et Francfort.
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Entrée du Camp de Buchenwald |
De ce convoi initial de 933 hommes, 11 ont réussi à s'évader lors de la traversée de la Marne, 1 est décédé durant le transport. Sur ces 921 déportés arrivés à Buchenwald, 821 sont français.
A ton arrivée, considéré comme prisonnier politique, tu es immatriculé 38958
Ta carte de détenu mentionne que tu es affecté au bloc 63.
Ce bloc 63 faisait partie du "petit camp", zone de quarantaine aménagée au nord du camp des prisonniers par les SS fin 1942. Il était séparé du reste du camp par des barbelés. Les déportés en provenance de tous les pays occupés par l'Allemagne y restaient quelques semaines avant d'être envoyés dans des camps extérieurs.
Dès le 21 décembre 1943, tu arrives au Kommando de Dora.
La tâche de ce Kommando consiste à transformer un stockage souterrain en usine moderne pour la production des fusées V1 et V2 à la chaîne, ces fameuses "armes secrètes" .
Tu vis littéralement l'enfer sur terre à DORA, dont le nom bien loin d'être le doux nom d'une femme ou d'un dessin animé, signifie "Deutsche Organisation Reichs Arbeit" - Organisation allemande du travail du Reich.
En permanence dans le tunnel, à trimer 18 heures par jour (12 heures de travail et 6 heures de formalités et de contrôles), dans une poussière qui brûle les poumons.
Pour s'aliter, des alvéoles ont été creusées sur 4 hauteurs et 120 mètres de long. Elles sont occupées en permanence, par les roulements d'équipes... impossible de vraiment dormir
Le froid et l'humidité sont intenses, l'eau suinte des parois provoquant une moiteur écœurante et permanente.
Le bruit est insoutenable : machines, marteaux-piqueurs, cloche de la locomotive, explosions continuelles dans ce tunnel clos où tout résonne en échos...
Pas de chauffage, pas de ventilation, pas de bac pour se laver, des toilettes constitués de fûts coupés par le haut sur lesquels une planche est installée et... pas d'eau potable !
Les déportés ne voient la lumière du jour qu'une fois par semaine, à l'occasion de l'appel du dimanche !
La violence des S.S. n'a pas de limites entre moqueries, barbarie, persécutions, pendaisons...
Tu survivras moins de 7 semaines dans cet enfer où les conditions de vie et de travail sont atroces et inhumaines !
Mon pauvre André, je n'arrive même pas à imaginer à quel point tu as dû souffrir !
Tu meurs officiellement le samedi 05 février 1944 d'une faiblesse cardiaque par insuffisance mitrale.
Ton corps est sous doute jeté dans un camion, entassé au milieu de tes autres compagnons d'infortune... pour finir engouffré dans le four crématoire de Buchenwald.
Sur les 60 000 prisonniers de 21 pays passés par Dora, plus de 20 000 périrent !
Sur tous les documents que j'ai pu obtenir (archives de Dora, d'Arolsen...), tu es mentionné célibataire. Pourtant, l'émouvant avis de décès familial évoque ton épouse dont je ne cite volontairement pas le nom.
Tu peux reposer en paix, ta bien-aimée a vécu longtemps puisqu'elle s'est éteinte à 98 ans fin 2020. Son époux portait le même prénom que toi et ils ont eu 5 enfants (4 petits-enfants et 2 arrière-petits-enfants).
Tu es déclaré "Mort Pour La France" et par arrêté en date du 1er avril 1998, la mention "Mort en déportation" a été apposée sur ton acte et jugement déclaratif de décès.
Tu es décoré à titre posthume de la Médaille de la Résistance française.
Ton nom figure aussi sur la plaque commémorative de la SNCF, située dans le hall de la Gare de Sarrebourg (Moselle).
Une notice t'est également consacrée dans "Le Livre des 9000 déportés de France à Mittelbau-Dora" aux éditions du Cherche Midi.
Tu vois, mon cher André, ton nom ne tombera pas dans l'oubli et je tiens aussi à honorer ta mémoire au travers de cette lettre.
Je n'ai qu'un regret : ne pas pouvoir mettre un visage sur ton nom... mais j'ai tellement le sentiment de te connaître que ce n'est finalement pas si important.
"Personne ne s'évade de Dora, sauf ceux qui partent par la cheminée..."
disaient les SS.
Mais s'ils ont voulu vous anéantir, votre souvenir ne tombera jamais dans l'oubli !
Repose en paix, très cher cousin.
12 janvier 2021
14 juillet 1691 - Un enfant de 12 ans massacré par les loups à Hauterives (Drôme)
10 janvier 2021
1725 - Le septième enfant de mes ancêtres à la dixième génération tiré du ventre
16 OCTOBRE 1725 - L'ACTE DU SEPTIEME ENFANT DE MES SOSAS 726 ET 727
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Mon coup de coeur
Eté 1933, j’ai 20 mois et je suis en danger...
Automne 1931 Je viens au monde sans savoir qui je suis vraiment. Moi, Hermine , suis née un soir, début novembre 1931, à la materni...
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